Étroite est la porte, resserré le chemin qui mènent à la vie, et il y en a peu qui les trouvent. Mathieu 7:14
Malgré que tout l’enseignement de Jésus ne parle que de cette porte et de ce chemin, il est tout à fait normal qu’ils ne soient pas vus ni trouvés. L’accession à la compréhension EST l’accès à un autre niveau d’être. Dans toutes les traditions spirituelles il est dit que tant que la personne n’est pas mûre pour entendre et comprendre elle n’entendra pas et ne comprendra pas, même si certaines paroles parviennent à ses oreilles des centaines de fois.
Lorsque Jésus nous dit, à propos d’une parole qu’il a prononcé, que d’elle DÉPEND toute la loi et tous les prophètes, ça vaut la peine de s’arrêter et d’y réfléchir au cas où elle contiendrait la clé de la porte étroite.
« Et voici le second (commandement) qui est SEMBLABLE au premier (commandement) :
Tu aimeras ton prochain comme (TU T’AIMERAS) toi même »
Nous l’avons vu : s’aimer soi même n’est pas possible sans un certain REGARD sur soi.
Cela veut dire : CONSCIENCE de soi. C’est la Conscience et elle seule qui est à même de porter son regard, son attention sur notre propre humanité manifeste, existante. Autrement dit : ce second commandement qui est semblable au premier et qui exige de porter un certain regard sur notre propre humanité… est LE commandement de l’éveil, ou du réveil, de la Conscience
Du coup, prend sens le grand nombre de fois où Jésus évoque des oppositions binaires entre « être réveillé ou être endormi », entre « être vivant ou être mort », entre « être attentif ou être dispersé », entre « être prudent ou être inconscient ». C’est que sans conscience de soi, il ne peut pas y avoir d’amour de soi. Comme sans conscience de l’autre il ne peut pas y avoir d’amour de l’autre. Et ces deux amours, dons l’assise ne peut être que une certaine qualité d’effort conscient, ne peuvent pas exister sans le cordon ombilical qui nous unit à notre origine primordiale : le Tout-Autre, le Notre-Père, l’Omniscient, le Miséricordieux. D’où le sens de reconnaître que c’est par le commandement premier, l’amour à Dieu, que tout l’édifice de notre vie, de notre cheminement par la porte étroite, par le chemin resserré, peuvent aboutir au vécu de Communion, et à un bonheur qui dépasse l’entendement.
Puisque Jésus nous dit que de cette parole « dépend toute la loi », j’en viens maintenant à évoquer une des conséquences doctrinales et ecclésiastiques, à savoir la question de la confession, appelée aussi sacrement de la pénitence, où plus récemment la réconciliation.
Historiquement, pendant pratiquement les premiers mille ans de la chrétienté, il a été donné sous la forme de la pénitence publique. Celle-ci s’appliquait aux grands pécheurs coupables de meurtres, d’apostasie et d’adultère. Elle comportait une longue pénitence qui exprimait la conversion et s’achevait par la réintégration dans la communauté liturgique pour la fête de Pâques. Elle était comme le renouvellement du baptême et n’était donnée qu’une fois dans la vie. Vers le VII siècle commence à apparaître une modalité de confession privée d’origine monastique, qui était en grande partie un entretien entre le moine et son guide spirituel. Le concile de Latran (1215) prescrit la confession annuelle comme : « Tout fidèle de l’un ou l’autre sexe parvenu à l’âge de discrétion doit lui-même confesser loyalement tous ses péchés au moins une fois l’an à son curé, accomplir avec soin la pénitence à lui imposée et recevoir avec respect, au moins à Pâques, le sacrement de l’eucharistie ». Vers le XVII siècle la confession fréquente est proposée par l’église comme moyen de progression spirituelle. Le concile Vatican II a demandé de promouvoir une participation plus communautaire aux sacrements. En 1973, pour répondre à cet objectif, est édité le Rituel romain de la Pénitence (en 1978 pour la version en français) qui prévoit trois formes de célébration du sacrement de pénitence et de réconciliation : soit une célébration classique à deux, le prêtre et le pénitent ; soit une célébration préparatoire collective (notamment avant les grandes fêtes liturgiques) mais débouchant sur un aveu et une absolution individuels ; soit, de façon exceptionnelle, une célébration collective avec confession et absolution collective. Pour une part, les célébrations collectives, encore appelées célébrations pénitentielles, ont joué leur rôle, permettant une meilleure préparation communautaire et une redécouverte du sens du péché et du sacrement, rompant avec une forme de ritualisme routinier qui avait pu s’installer. Elles ont aussi permis de rapprocher du sacrement des personnes qui s’en étaient éloignées.
Lorsqu’il s’agit de parler de n’importe quel aspect ecclésiastique ou doctrinal, nous sommes inexorablement confrontés à deux conceptions de la figure de Jésus : Soit le Jésus-Dieu, Soit le Jésus-Maître. Par ailleurs, on retrouve cette dualité dans toutes les grandes traditions spirituelles. Je voudrais ici dire que ceux qui font un crédit plus ou moins absolu à l’équation Jésus = Dieu, parce qu’il est le Fils de Dieu incarné, ont 100% raison. Mais je constate souvent une incapacité pour se mettre à l’écoute de ce que ce Fils de Dieu incarné a essayé d’enseigner à ses disciples et donc à nous tous. Chacun des mots de Jésus nous dit que chacun de nous est aussi le Fils de Dieu incarné, qui s’ignore, et qu’il nous faut la grâce d’avoir la véritable foi en son enseignement pour chercher la porte étroite et le chemin resserré qui conduit de la mort à la vie, du sommeil à l’éveil, du malheur au Bonheur, de ce monde au Royaume. « En vérité, le
Royaume est dans votre cœur ». Ce processus, ce chemin de dé-couverte (de Soi) que les Pères des premier temps de la chrétienté nommaient Théosis. Porte étroite, chemin resserré que les grands saints de la chrétienté ont trouvé, compris, parcouru et sont ainsi devenus témoignage vivant et gloire de l’enseignement de Jésus.