Quel drame immense !!
Je n’ai pas pu m’empêcher d’écrire cela.
Quel drame immense !!
Jésus nous a enseigné une Unique Prière.
Cette Unique Prière contient le condensé de son enseignement.
Cette Unique Prière nous enseigne comment nous adresser à Dieu.
Cette Unique Prière nous enseigne quelle est la nature de notre relation à Dieu.
Notre Père.
Cette Unique Prière est conçue pour être priée en ecclesia, en assemblée.
Cette unique prière, lorsque nous la prions en solitude, ne peut être que :
« Mon Père qui es aux cieux,
que ton nom soit sanctifié,
que ton règne vienne… »
« N’appelez personne sur la terre votre père;
car un seul est votre Père,
celui qui est dans les cieux » (Mathieu 23-9)
Comment, après ces paroles aussi catégoriques, aussi limpides, qui ne laissent place au moindre doute peut-on encore dire, et enseigner « Jésus Fils Unique de Dieu ». Est-ce donc si difficile de voir que cela équivaut à contre-dire Jésus frontalement ? Il serait déjà plus juste de dire « Jésus Fils de Dieu Par Excellence » dont la mission divine était de nous enseigner notre condition à tous de Fils de Dieu, aliénés et égarés que nous sommes à notre divine royauté immanente, aliénés et égarés que nous sommes à la communion avec le Père, aliénés et égarés que nous sommes au Royaume de Dieu
« Et Jésus, voyant qu’il avait répondu avec intelligence, dit au scribe : « Tu n’es pas loin du Royaume de Dieu » Marc 12.34
Alors Jésus, parlant à la foule et à ses disciples, dit: « Les scribes et les pharisiens sont assis dans la chaire de Moïse. Faites donc et observez tout ce qu’ils vous disent; mais n’agissez pas selon leurs œuvres. Car ils disent, et ne font pas. Malheur à vous, scribes et pharisiens hypocrites! parce que vous fermez aux hommes le royaume des cieux; vous n’y entrez pas vous-mêmes, et vous n’y laissez pas entrer ceux qui veulent entrer.
« Tu n’est pas loin du Royaume de Dieu »
« Vous n’entrez pas au Royaume, et vous n’y laissez pas entrer ceux qui veulent entrer ».
« Dites : « Mon Père, que ton nom soit sanctifié ».
« Un seul est votre Père, celui qui est dans les Cieux »
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Entre le monde de la communion des saints (ou ce qui est la même chose, le monde de la communion au Père, le monde de la Sainte Communion) et le monde du théologisme il y a la même distance structurelle que entre Jésus et les pharisiens. Le monde de la communion des saints est expérientiel et « au-delà de l’entendement ». Le monde de la théologie reste au niveau intellectuel, conceptuel, relatif à la pensée et à la parole.
« Ils disent mais ils ne font pas ». Qu’est-ce que les pharisiens ne font pas ? Qu’est-ce que Jésus signale vigoureusement que les pharisiens disent mais ils ne font pas ?
« Ils n’entrent pas dans le Royaume des Cieux. »
Et en plus : « Ils ferment aux hommes le Royaume des Cieux, ils ne laissent pas entrer ceux qui veulent entrer « .
Tout l’enseignement de Jésus est dirigé à faire le contraire de cela, tout l’enseignement de Jésus est dirigé à nous donner le modus operandi, le mode d’emploi, le manuel, pour entrer au Royaume des Cieux. Pour nous faire dé-couvrir notre vraie nature, pleinement et en vérité : Fils de Dieu. Et non pas fils adoptifs, c’est à dire non-fils. Et non pas des êtres de seconde ou de troisième zone…
Hélas !! La formule « Jésus Fils Unique de Dieu » s’oppose au cœur du cœur de l’enseignement de Jésus. Elle s’oppose à la formulation centrale de la seule prière que Jésus nous a enseigné. « Notre Père », « Mon Père ». Et à partir de là, elle s’oppose à l’ensemble de l’enseignement de Jésus. A partir de là, elle ferme aux hommes le Royaume des Cieux. A partir de là, elle ne laisse pas entrer ceux qui veulent entrer.
Pourquoi donc cette peur panique du Jésus maître spirituel qui transmet un enseignement? Pourquoi donc, alors que Jésus revendique ce titre sans ambiguïté ? Alors qu’il se revendique même comme le maître spirituel par excellence ?
« Alors Jésus s’adressa aux foules et à ses disciples :
Ne vous faites pas appeler Rabbi (maître) car un seul est votre Maître, et vous êtes tous frères. Ne vous faites pas donner le titre de maîtres, car vous n’avez qu’un seul maître, le Christ ». Mathieu 23
Pourquoi donc, par quelle incroyable opération de scotome, vient-on à oublier que les douze se vivaient, se désignaient eux-mêmes, et on les désigne encore, comme des : : : : :
Disciples
Disciples. Quelle est la nature d’un disciple sinon celle de recevoir un enseignement ? De quel type d’enseignement s’agit-il ? Est-ce que Jésus était un instructeur pour apprendre à bien vivre en société ? Pour apprendre des bonnes manières à ses élèves ? Où est-ce que Jésus était un maître spirituel qui transmet un enseignement spirituel ?
L’enseignement de Jésus est un ensemble d’instructions destinées à rendre possible un processus de transformation au bout duquel la nature superficielle (le vieil homme) va finir par laisser place à la nature essentielle (l’homme nouveau). On appelle cela naître à l’Esprit, entrer dans le Royaume, Communion avec le Père. Dans le christianisme originel, c’est à dire dans le vrai christianisme, on appelait (et on appelle toujours) ce processus la Théosis : l’appel de l’homme à rechercher le salut (le Bonheur vrai) par l’union avec Dieu. C’est le processus de déification de l’homme. Un des Pères de l’Église, figure majeure du christianisme antique, Saint Athanase d’Alexandrie, dit Le Grand (296-373), évêque et patriarche d’Alexandrie dira : « Le Verbe de Dieu s’est fait homme pour que nous devenions Dieu »
Nous avons mentionné deux questions d’une importance capitale :
Comment est-ce possible qu’on soit venu à la formule « Jésus Fils Unique de Dieu » en opposition frontale et évidente au cœur du cœur de l’enseignement explicite de Jésus ?
Et comment est-ce possible qu’on soit venu à quasiment faire disparaître la dimension de Jésus en tant que maître spirituel qui transmet un enseignement à ses disciples ?
C’est seulement la connaissance d’autres traditions spirituelles qui peut nous éclairer. Il nous faut prendre de la hauteur spatio-temporelle pour pouvoir décrypter ce phénomène.
- 1. Nous découvrons que plus grande est la puissance, le rayonnement d’un maître spirituel, plus ses disciples ont tendance à privilégier l’adoration, la dévotion, pour bénéficier des bénédictions (bien réelles) qu’un tel maître peut apporter. Ceux qui ont eu le privilège d’être témoins de l’éblouissant rayonnement spirituel de Jésus ne pouvaient que agir de la même façon. Les grands maîtres spirituels d’autres traditions ont prévenu contre ce danger qui guette les disciples, qui est de se cantonner à l’adoration, à la dévotion et aux bénédictions reçues, en négligeant l’enseignement, les instructions reçues pour que le processus de transformation avance. Jésus ne fait pas exception à cette règle :
Ceux qui me disent: Seigneur, Seigneur! n’entreront pas tous dans le royaume des cieux, mais celui-là seul qui fait la volonté de mon Père qui est dans les cieux. Plusieurs me diront en ce jour-là: Seigneur, Seigneur, n’avons-nous pas prophétisé par ton nom? n’avons-nous pas chassé des démons par ton nom? et n’avons-nous pas fait beaucoup de miracles par ton nom? Alors je leur dirai ouvertement: Je ne vous ai jamais connus, retirez-vous de moi, vous qui commettez l’iniquité. C’est pourquoi, quiconque entend ces paroles que je dis et les met en pratique, sera semblable à un homme prudent qui a bâti sa maison sur le roc. La pluie est tombée, les torrents sont venus, les vents ont soufflé et se sont jetés contre cette maison: elle n’est point tombée, parce qu’elle était fondée sur le roc. Mais quiconque entend ces paroles que je dis, et ne les met pas en pratique, sera semblable à un homme insensé qui a bâti sa maison sur le sable. Mathieu 7
- 2. Tous les maîtres spirituels ont fait face à l’impossible compréhension de leurs disciples, même les plus tenaces et volontaires, même ceux qui ressentaient de façon la plus brûlante l’appel à rechercher le salut (le Bonheur vrai) par l’union avec Dieu. Le vieil homme fasciné par le monde, prisonnier de ses peurs et ses désirs, a du mal à saisir la direction à prendre pour sortir de sa fascination et sa prison. Il n’est pas à sa portée d’imaginer que il y a un Royaume, autre que celui où il réside, et encore moins comment procéder pour y accéder.
Entrez par la porte étroite. Car large est la porte, spacieux est le chemin qui mènent à la perdition, et il y en a beaucoup qui entrent par là. Mais étroite est la porte, resserré le chemin qui mènent à la vie, et il y en a peu qui les trouvent. Mathieu 7
- 3. Il est acquis dans tous les enseignement spirituels que sur l’ensemble de ceux qui entrent en relation avec un maître spirituel accompli (à fortiori avec un maître de l’envergure de Jésus), la fine pointe de ceux qui entreront en résonance avec l’essence de son enseignement seront inexorablement peu nombreux (« Car il y a beaucoup d’appelés, mais peu d’élus« . Matthieu 22, 14) . Mais il y aura bien d’autres disciples aux grandes qualités chez lesquels cet enseignement réveillera une intense dévotion, et qui constitueront pour ainsi dire le corpus terrestre, le véhicule, grâce auquel et à l’intérieur duquel l’enseignement originel pourra se préserver et traverser les âges.
- 4. La quatrième raison de ce phénomène si particulier (pour rappel : faire disparaître l’aspect le plus important de l’enseignement de Jésus, et faire disparaître sa condition de maître spirituel) concerne ceux qui ont été au plus près de Jésus physiquement pendant son séjour sur terre, et ceux qui ont constitué le noyau fondateur du christianisme pendant les premiers temps, et les temps qui ont suivi. Depuis d’innombrables générations, quel archétype existait dans la psyché des juifs de ce que serait le Messie à venir lorsqu’il viendrait ? Il serait Dieu incarné, il serait leur Dieu incarné, le Dieu du peuple élu exclusivement, plus Dieu incarné que nul autre sur terre ne pourrait exister dans le passé le présent et l’avenir. Le peuple élu, à travers la figure de son Messie, devrait affirmer sa suprématie totale, à la fois matérielle et spirituelle sur l’ensemble du monde. Voilà la promesse inscrite dans la psyché de la garde rapprochée de Jésus, de ceux qui ont constitué le noyau fondateur du christianisme pendant les premiers temps, et les temps qui ont suivi. Mais depuis les premiers temps, deux conceptions coexistent de ce qu’est Jésus. Une conception officielle, pour laquelle Jésus est à la fois Dieu incarné et fils unique de Dieu. De cela se dérive qu’une véritable spiritualisation de l’homme, une spiritualisation digne de ce nom, ne peut avoir lieu que dans la reconnaissance de ce fait. Ceux qui ignorent ou ne reconnaissent pas ce fait seraient, intrinsèquement et inexorablement, dans une erreur fondamentale, et leur spiritualisation ne pourra qu’être boiteuse. A contrario, ceux qui reconnaissent ce fait deviennent de facto partie intégrante d’un nouveau peuple élu. Un unique peuple élu qui hérite et reprend à son compte le vieil archétype. A savoir, un peuple qui, à travers la figure de son Messie, est destiné à affirmer sa suprématie totale à la fois matérielle et spirituelle sur l’ensemble du monde. Nous aurons l’occasion de revenir sur les paroles de Jésus avec lesquelles il essaye sans cesse de sortir ses congénères, parfois avec des mots rudes et sévères, du piège mortel où ils s’enferment et où ils veulent l’enfermer, les paroles avec lesquelles Jésus essaye de déconstruire l’archétype de leur suprémacisme ethnique et spirituel.
- Mais il existe une autre conception de ce qu’est Jésus, à savoir le Fils de Dieu par excellence, venu donner à l’humanité une impulsion d’élévation spirituelle par la qualité extraordinaire de son être, mais aussi par un enseignement extrêmement dense, percutant et efficace pour nous faire découvrir notre vraie nature, la communion avec le Père, et donc notre vrai bonheur. Cela, tout au long de l’histoire, une immense litanie de saints l’ont compris, et ils en sont devenus la preuve vivante. Cela, en dehors de toute notion de suprémacisme.
Les pharisiens ne pouvaient pas s’empêcher de prendre des pierres pour les lancer contre Jésus à chaque fois qu’ils l’entendaient dire qu’il était fils de Dieu : ils ne pouvaient pas s’empêcher aussi de négliger totalement, de rester sourds et imperméables à l’enseignement explicite de Jésus : « Vous aussi vous êtes fils de Dieu ».
D’autres, un peu plus attentifs et dévoués, ont bien entendu la parole de Jésus lorsqu’il disait qu’il était le fils de Dieu, le rayonnement spirituel éblouissant de Jésus et ses faits miraculeux constants leur ont facilité la tâche d’y croire à sa parole. Mais ils n’ont pas pu s’empêcher, tout comme les pharisiens, de rester sourds et imperméables à son enseignement qui n’a cessé de marteler : « Vous aussi, vraiment, vous êtes fils de Dieu ». (Encore vous faut-il vous mettre au travail, écouter et mettre en pratique mon enseignement pour que votre vraie nature soit libérée des scories qui la recouvrent).
Son enseignement, du début à la fin, en bon maître spirituel, et en maître spirituel par excellence, se réduit à ça : « Votre véritable destin, le véritable but de votre vie, est de découvrir votre royauté immanente, votre condition céleste, d’entrer dans le Royaume de Dieu, d’être en communion avec le Père ». Et il nous donne le mode d’emploi, le manuel, pour faire ce travail de découverte, au jour le jour, d’instant en instant : « Veillez et priez ». « Cherchez la vérité ». « Accueillez la volonté du Père ». Il est nécessaire qu’il nous soit donnée une Grace (que Ton Royaume vienne) : celle qui consiste à ce que la part essentielle en nous entre en résonance avec la parole du Maître pour que la mise au travail s’enclenche : Que se passe-t-il alors ? Il se passe la naissance du Disciple. Il se passe la naissance du Veilleur. Il se passe la naissance du Chercheur de Vérité. Il se passe la naissance de l’Accueillant de la volonté du Père.
La naissance du Disciple, du Veilleur, du Priant, du Chercheur, et de l’Accueillant, c’est cela naître à l’Esprit.
C’est cela commencer à se rapprocher du Royaume de Dieu. Tel que Jésus l’a dit au « scribe qui parlait avec discernement« .